Je dois à Pascal (que je remercie) la découverte d’une face cachée de la poésie de la Renaissance, de Clément Marot en l’occurrence.
Clément Marot, qui fut toute sa vie amoureux des femmes, inventa une nouvelle forme de poèmes : le blason, dont l’exemple le plus connu est “Le Blason du Beau Tétin” écrit en 1535.
Tétin refait, plus blanc qu’un œuf,
Tétin de satin blanc tout neuf,
Tétin qui fais honte à la rose,
Tétin plus beau que nulle chose
Tétin dur, non pas Tétin, voire,
Mais petite boule d’ivoire,
Au milieu duquel est assise
Une fraise, ou une cerise,
Que nul ne voit, ne touche aussi,
Mais je gage qu’il est ainsi.
Tétin donc au petit bout rouge,
Tétin qui jamais ne se bouge,
Soit pour venir, soit pour aller,
Soit pour courir, soit pour baller.
Tétin gauche, Tétin mignon,
Toujours loin de son compagnon,
Tétin qui portes témoignage
Du demeurant du personnage.
Quand on te voit, il vient à maints
Une envie dedans les mains
De te tâter, de te tenir
Mais il se faut bien contenir
D’en approcher, bon gré ma vie,
Car il viendrait une autre envie
Le genre eut un tel succès que les blasons fleurirent de toutes parts… Est-ce en réaction, ou s’était-il fâché avec sa belle ? Il écrivit ” Le Blason du Laid Tétin “, qui bien que franchement hilarant ne connut pas le même succès… Jugez vous mêmes !
Tetin, qui n’as rien, que la peau,
Tetin flac, tetin de drapeau,
Grand’ Tetine, longue Tetasse,
Tetin, doy-je dire bezasse ?
Tetin au grand vilain bout noir,
Comme celuy d’un entonnoir,
Tetin, qui brimballe à tous coups
Sans estre esbranlé, ne secoux,
Bien se peult vanter, qui te taste
D’avoir mys la main à la paste.
Tetin grillé, Tetin pendant,
Tetin flestry, Tetin rendant
Vilaine bourbe au lieu de laict,
Le Diable te feit bien si laid :
Tetin pour trippe reputé,
Tetin, ce cuydé-je, emprunté,
Ou desrobé en quelcque sorte
De quelque vieille Chievre morte.
Tetin propre pour en Enfer
Nourrir l’enfant de Lucifer :
Tetin boyau long d’une gaule,
Tetasse à jeter sur l’epaule
Pour faire (tout bien compassé)
Ung chapperon du temps passé ;
Quand on te voyt, il vient à maints
Une envye dedans les mains
De te prendre avec des gants doubles
Pour en donner cinq ou six couples
De soufflets sur le nez de celle
Qui te cache sous son aisselle.
Va, grand vilain Tetin puant,
Tu fourniroys bien en suant
De civettes et de parfums
Pour faire cent mille deffunctz.
Tetin de laydeur despiteuse,
Tetin, dont Nature est honteuse,
Tetin des vilains le plus brave,
Tetin, dont le bout tousjours bave,
Tetin faict de poix et de glus :
Bren ma plume, n’en parlez plus,
Laissez-le là, veintre sainct George,
Vous me feriez rendre ma gorge.
J’ai préféré de pas mettre d’illustration pour le laid tétin…
Pour ceux que ça amuse, ce “contre-blason” a été mis en musique par Jacob Clemens non papa, et chanté par Dominique Visse et l’ensemble Clément Janequin.
Superbe !
Je proposerais bien ça au programme du bas l’année prochaine 😉
hummm…. chaque fois que je vais au Louvre je vais voir ce tableau… et j’y reste béat à contempler cette scéne hynoptissante, énigmatique… puissiez-vous (pardon on en est au tu).. partager ma
chére ce que je peux ressentir en utilisant ces adjectifs… on en parlera un jour prochain … peut-être ??