Je termine un nouveau merveilleux bouquin de Tracy Chevalier, dont je découvre à l’instant qu’il a été traduit en français sous le titre “L’innocence”.Bon, c’est pas pour frimer, mais je l’ai lu en anglais, et je suis bien contente, mes relations avec les traducteurs n’étant pas toujours au beau fixe… Donc en anglais, ça s’appelle “Burning Bright” et ça ressemble à ça.
Le titre vient d’un poème de William Blake, l’un des personnages les plus marquants du roman, mais commençons par le commencement…
Dans le Londres de la toute fin du XVIII° siècle arrive la famille Kellaway, quittant son Dorset natal pour fuir le souvenir de la mort d’un enfant. Pour eux tout est un choc, l’absence de nature, la foule, le fog, l’anonymat de la ville …
Je ne vais pas tout vous raconter, mais si je vous dis qu’un cirque tient une grande place dans le livre, vous ne serez pas étonnés, surtout si vous avez regardé la couverture !
Tout dans ce livre est un enchantement : la minutie avec laquelle Tracy Chevalier nous donne à voir, entendre, presque sentir et palper, l’histoire, bien sûr, les personnages si attachants, surtout Jem, Maggie et Maisie, entre enfance et adolescence, entre innocence et expérience. L’occasion aussi pour moi de faire la connaissance de William Blake. Personnage secondaire et pourtant central du livre, cet artiste illuminé composait poèmes et chansons, peignait, gravait, et imprimait lui même ses livres avec une technique originale : il écrivait à l’envers sur des plaques de cuivre et les ornait de ses dessins qu’il reproduisait ainsi. Le résultat est étonnant, si moderne qu’on a du mal à penser qu’il est mort en 1827.
Là c’est Dieu, au cas où vous ne l’auriez pas deviné… Et ci dessous, le tigre, avec le poème d’où est tiré le titre du livre.
Dans ce Londres angoissé par la révolution française et secoué par la terreur anti-jacobine, cet artiste radical qui refusait la morale chrétienne et le dogmatisme religieux n’aura pas la vie facile. Le livre se situe entre la publication de ses “Songs of Innocence” et de ses “Songs of Experience”.
L’occasion aussi de nous souvenir que la vie n’était pas si facile en ce temps là. Qu’à 14 ans les gamines passaient près de 60 h par semaine dans des usines de moutarde (ou autres) qui leur détruisaient sinus et poumons, qu’un premier amour menait presque toujours à une grossesse non désirée et à la ruine de toute une vie, que si ta maison brûlait tu n’avais plus rien, et qu’on mourrait encore de faim.
Mais surtout, un merveilleux roman, d’une grande richesse, qui nous laisse le regret de l’avoir déjà fini, les larmes aux yeux souvent, et une fenêtre ouverte sur de nouveaux horizons.
Pour terminer, une citation de William Blake, qui influencera Aldous Huxley aussi bien que les Doors :
” If the doors of perception were cleansed everything would appear to man as it is, infinite”
“Si les portes de la perception étaient nettoyées, chaque chose apparaîtrait à l’homme comme elle est, infinie”
Que j’aime ce livre !
Je te rassure: je l’ai lu en Français et n’ai aucunement été gênée par la traduction. Avec “la jeune fille à la perle”, c’est vraiment le roman de Tracy Chevalier que je préfère. La description du
milieu du cirque est passionnante. Le personnage de Philip Astley (historique, il est d’ailleurs enterré au Père Lachaise) est fascinant.
Sur la condition ouvrière et humaine à Londres, il faut absolument lire “The people of the Abyss” de Jack London ( on le trouve en Français chez 10/18 ou Phébus). Écrit en 1903, c’est une immersion
cauchemardesque dans les quartiers pauvres de Londres, qui n’avaient alors rien à envier à ceux de l’époque décrite par Chevalier. Une lecture oppressante mais magnifique.
Une dernière chose: la couverture de l’édition anglaise de Burning Bright est tout simplement magnifique !
bonjour, je vois que tu t’intéresse à William Blake….. mon prochain disque lui est entièrement dédié: “Ode to William Blake” 16 chansons avec ses poèmes. La plupart viennet de Songs of Innocence
& Experience.Je joint à ce disque un petit livre et je cherche toute info et traductions pour l’étailler. Je cherche avant tout du domaine public J’ai pu constater avec Blake, combien le
copyright abusif nuisait à l’information. Sans doute W. Blake serait étonné de voir que l’on se fait de l’argent sans effort sur son oeuvre. (prendre une photo d’un tableau ne devrait pas donner la
possibilité d’éxiger un copyright, voir la fondation Wikimédia)…..je cherche des traductions (DP) des textes que je chante.
deux des titres (non masterisé):
http://www.wat.tv/audio/to-tirza-2fev10-267m5_267f1_.html
http://www.wat.tv/audio/vagabond-27jan10-25f2k_267f1_.html
belle vie
«L’oiseau a son nid, l’araignée sa toile, et l’homme l’amitié.»
[ William Blake ] – Extrait de Le mariage du ciel et de l’enfer